> Fox22 a écrit:
> Je ne sais pas si tu es sérieux mais je vais quand même te répondre. Tu crois vraiment que parler à un IA hentai va aider la santé mental des gens qui s'isolent?
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Je sais qu'on est pas dans la section débât, mais je pense que la réflexion vaut le coup.
Je dresserais une comparaison avec les fumeurs qui savent très bien que chaque bouffée les rapproche d'ennuis interminables dans une société où l'accès au soin se dégrade continuellement. Ils le savent très bien et y pensent sans doute plus souvent que les non-fumeurs (quelqu'un se souvient du topic sur les fumeurs/cigarette ? ^^) mais je doute que la piqûre de rappel soit un soutien suffisant pour les pousser dans la bonne direction. Au contraire !
Ma compréhension actuelle du comportement humain est que nous sommes influencés par divers moteurs plus ou moins conscients.
Alors je ne suis pas vraiment fan des tentatives de classification freudiennes du moi du surmoi et de l'égo enfoui, mais disons que les actions qui composent nos comportement ont des degrés variables de conscience: machouiller devant Netflix, conduire au boulot, miner dans Minecraft, préparer un plaidoyer pour un client... et s'abandonner à ses habitudes hédonistes quelles qu'elles soient.
À force de répéter une habitude, on finit je pense par l'intégrer à notre image de nous-mêmes. De tout temps les gens s'identifient entre-eux par leur activité (voir tous les noms dérivés de professions) et il n'est pas étonnant que ce processus s'applique à soi pour beaucoup.
La société moderne ayant occulté les concepts qui permettaient autrefois d'apaiser les esprits faisant cohabiter la construction de son identité avec un "péché" (« tu peux te repentir, l'humain est pêcheur par nature de toute façon, etc ») on se retrouve à choisir entre admettre être un salaud ou réviser sa moralité pour sortir ses pratiques et inclinations du coté obscur pour les normaliser. Voire, et ça fait peur quand on y pense, développer le réflexe de ne même plus questionner ces pratiques parce qu'elles sont vêtues de la même impérieusité que la respiration.
Je le sais pour y être passé, mais le circuit de la récompense est conçu pour graver définitivement les sources de sa stimulation en besoins irrésistibles, quitte à réecrire notre personalité pour la mettre au service de ladite source. C'est pour ça que les héroïnomanes se lèvent à 3h du mat pour fouiller le sac de leur grand-mère qui a accepté de les loger pour la nuit parce qu'ils étaient en galère. C'est pour ça qu'il leur est préférable d'accepter de subir les pires sévices si c'est dans la perspective d'avoir une dose.
Idéalement, la potence de la dopamine devrait juste nous motiver à chercher les sommets des colines, ne pas trop nous éloigner des rivières, chercher les fruits rouges, les femmes rondes... mais c'était sans compter la nicotine, Tiktok, les jeux d'argent, l'alcool...
C'est le conditionnement pavlovien, ça réecrit la personalité. Je trouve d'ailleurs drôle (sombrement) qu'on associe cette idée aux animaux, mais ça reflète malheureusement la réalité parce que soumettre une conscience au diktat de pulsions physiques est précisément ce qu'on conçoit intuitivement comme animal, et à l'inverse l'humanité serait plutôt le fait de s'en affranchir.
Il y a dans ce processus une perte indéniable de libre-arbitre. Or, parce qu'il nous est difficile de nous concevoir comme des esclaves sans volonté, on préfère rationaliser post-hoc cette domination qu'on subit et la mettre au même niveau que la pesanteur.
D'expérience, rappeler la réalité à un addict ne fait que raviver à ses yeux le reflet de sa ruine inéluctable SANS laisser entrevoir un espoir crédible d'un meilleur lendemain, ce qui renforce mécaniquement le besoin de nourir l'illusion/rationalisation qui est l'unique garant de sa sanité. Certaines réalités sont si douloureuses à admettre que l'esprit préfère parfois falsifier sa propre mémoire ou se scinder en personalités dockerisées que d'y faire face.
De là, quel espoir a-t-on que les gens concernés soient réceptifs à des arguments rationnels concernant l'objet de leur auto-duperie volontaire ?
Bref, tout ce blabla pour dire que je recommande vivement toute tentative d'aider un addict de privilégier le fait de présenter la démarche de sevrage comme étant à sa portée, plutôt que d'insister sur le discours alarmiste qui est certes plus rationel (et dans une certaine mesure, véridique) mais on a vu que ça ne fait qu'empirer la situation pour le concerné. Et audelà d'encouragements, un accompagnement quasi-quotidien pour remplacer l'addiction par quelque chose de plus vertueux, même si c'est juste une partie de foot dans le quartier, est souhaitable.
Mais le pire, c'est que c'est vraiment à la portée de tout le monde de se sevrer mais c'est un argument rationel incomestible pour l'addict 😔
On ne peut mesurer la violence d'une tempête qu'une fois qu'elle s'éloigne, pas pendant qu'elle remue arbres et voitures devant nous. Lister les périls des comportements addictifs ne peut servir qu'à ceux qui ne sont pas sous leur emprise, donc au mieux ça peut avoir un effet préventif. Si on se trouve dans un cas curatif, c'est une toute autre démarche.
J'aurais souhaité qu'il existe d'autres solutions, mais bon mon expérience n'a pas voulu aller dans ce sens 😅 et c'est pas faute d'avoir essayé