[quote=Zabuza7]Désolé de doucher tes espoirs.
[spoil](Doucher > Sale > Puer > Cul. )[/spoil]
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Nous les grosses, on nous dit qu'on est très bien comme ça. La famille, les amis ne comprennent pas pourquoi on déprime autant, pourquoi on en vient à se haïr. Evidemment, je vois pas qui ça dérange que nous soyions grosses. Y'a personne qui va regarder le paysage et se dire "pitain y'a une grosse dans mon champ de vision, ça me gâche la vie!".
De même quand on croise les gens dans la rue, ça les gène pas qu'on soit grosse, ils croient même qu'on a été toujours comme ça, que c'est peut-être même un choix. Ils savent que dans la vie y'a des gros, alors il faut bien que ça tombe sur certains d'entre nous.
Y'a même des gens qui pensent nous consoler en nous disant que certains aiment les grosses! Comme si on avait envie d'être aimée pour ça, d'être aimée pour cette image répugnante qu'on a de nous-même.
Et quand on est presque enfin décidées à s'aimer comme ça, y'a les médecins qui nous conseillent des régimes, même si on est venu les voir pour autre chose.
Et puis y'en a d'autres qui adorent nous insulter ou se moquer de nous:
"quand elle monte dans la voiture il faut au moins 5 seconde pour que ça se stabilise"
"elle et Maïté, même gabari!"
"mammouth, bouboule, buldozère"
"toi tu risques pas de faire de l'hypoglycémie"
"pas possible qu'elle fasse un malaise avec l'alcool, t'as vu comme elle est, elle a du avalé la moitié du buffet!"
"j'ai vu une fille qui est encore plus grosse que toi"
et le célèbre "t'es pas grosse t'es dilatée"
Après on se demande pourquoi certaines d'entre nous ne mangent rien à la cantine devant tout le monde.
Même la prof de danse hallucine tellement on est grosse, et nous le fait bien sentir:
"mais tu manges quoi pour être comme ça?"
"c'est la graisse qui bloque tes mouvements"
"tu as un derrière de propriétaire"
"avec les cuisses que t'as ça devrait être facile de faire des entrechats quatre, pas comme marie l'anorexique!"
Et Marie qui a rien compris croit effectivement qu'avec ses petites cuisses c'est super dur de croiser les genoux.
Et elle nous explique gentiment que si elle nous met au fond de la scène pour le spectacle de fin d'année, c'est pour pas qu'on se moque trop de nous. Même si on est la meilleure de la classe, on aura jamais les premiers rôles, parce qu'on est grossses. Et tous les rôles d'hommes, c'est aussi pour nous les grosses.
Sans parler des regards désobligeants de la population qu'on cottoie. Il y a peu j'étais au centre commercial avec une amie très grosse. Un type s'est planté devant nous en regardant mon amie de haut en bas et a fait une tête de dégoût, suivie de ricannements. Il est clair qu'il a fait ça exprès juste pour nous faire du mal. Je l'aurais bien remis à sa place mais j'ai pas trouvé quoi faire, quoi dire.
Quand j'étais petite, j'étais déjà un peu en surpoids, pas de beaucoup mais j'ai une morphologie plutôt développée: des gros os, des gros muscles et une facilité à stocker la graisse. A 9 ans j'avais déjà la culotte de cheval. J'ai vu ça sur la cassette d'un spectacle de danse de l'époque. Des boules sur le côté des cuisses!
Au collège, j'ai pris 40 kilos en l'espace de 2/3 ans. Parce que je vivais un enfer à l'école tout comme à la maison.
A l'école, beaucoup de monde se moquait de moi pour diverses raisons, j'avais peu d'amies, et la pression scolaire était si forte que quand je rentrais chez moi je mangeais plusieurs paquets de biscuits pour décompresser avant de faire mes devoirs.
Les repas à la maison étaient toujours un moment désagréable que je m'appliquais d'écourter. Je mangeais peu et ramenais vite mon assiette dans la cuisine. Une fois seule dans la cuisine je remplissais mes poches de yaourts et de biscuits, et j'allais finir mon repas dans ma chambre.
Je me rappelle encore d'une visite médicale au collège, la femme médecin me reprochait d'avoir 6kg en trop. Si elle avait su que ça allait empirer, et pas qu'un peu...
Au lycée, j'ai fait une diète protéinée pendant les vacances scolaires et j'ai perdu 5kg en 10 jours. Je me sentais déjà plus légère. Certaines me félicitaient.
Pour la terminale j'ai eu envie de changer de lycée pour m'affranchir de la sale réputation que me collaient mes camarades depuis la 6ème. (Mon collège et mon lycée étaient le même établissement, et en plus j'ai eu le "privilège ultime" que mes parents travaillent dedans).
Arrivée dans mon nouveau lycée, j'ai trouver la force de poursuivre mes efforts quant à ma perte de poids. Je mangeais à ma faim, sans restrictions même au goûter, à part le soir où je ne mangeais qu'un yaourt. Je le vivais bien et comme j'avais beaucoup à perdre, j'ai perdu 10kg assez facilement, sur 1 an.
Après le bac, à 75kg, je me suis inscrite en fac de danse. Les cours de danse n'étaient pas très intensifs mais je surveillais mon alimentation. Je mangeais essentiellement ce qu'on trouve dans le commerce et qui est soi disant allégé. C'est à dire substituts de repas, biscuits allégés, yaourts 0%, jus de fruits sans sucres ajoutés, etc. Je croyais bien faire mais au bout de plusieurs mois j'avais toujours rien perdu.
J'ai alors rencontré un médecin endocrinologue qui m'a prescrit un régime protéiné assez particulier. Je ne me souviens plus exactement des menus, mais en gros: plus du tout de féculents ni de choses sucrées (à part les fruits en quantité limitées).
Je mangeais à volonté des protéines et des légumes de la liste à basses calories, et j'avais un quota de yaourts, de pommes à pas dépasser. Tout ça se répartissait sur 6 repas par jour.
Et j'ai fait ça durant 6 mois. Pendant 6 mois, pas une miette de chocolat, de biscuit, de pâte ou de riz. J'ai perdu les premiers mois 10 nouveaux kilos, puis plus rien. J'ai vécu ça comme un exploi car je pense que beaucoup de monde n'aurait pas réussi à se priver aussi longuement (ou alors ils sont pas médiatisés), c'est dire mon acharnement à vouloir maigrir. Même pour mon anniversaire: pas d'exception, j'ai eu droit à une salade de fruits. C'était pas la joie.
Il y a même une fois, pendant l'été, où j'ai invité 2 amies chez moi pour profiter de la piscine. Je leur ai servi des glaces pour le goûter, et je les ai regardées en mangeant ma tomate. Je vous laisse imaginer ce que ça peut faire de servir des glaces dans ces conditions...
J'étais donc à 65kg, mais c'était encore trop pour la nouvelle école de danse où je souhaitais poursuivre mes études.
Ah, j'oubliais. Entre temps j'avais passé une audition dans une célèbre école de danse de Cannes. On m'avait convoquée pour prendre un cours avec les élèves de l'école. J'étais arrivée 30min avant le début du cours mais ai dû attendre 25 minutes dans le couloir avant de pouvoir me présenter à l'accueil, surpeuplé de monde. Le directeur m'a dit un truc comme "elle vient passer une audition et elle arrive 5 minutes avant" l'air moqueur, bon j'ai pas relevé même si ça me paraissait mal placé.
J'ai suivi un cours de contemporain au fond de la classe, derrière les autres. Il était évident que j'étais assez perdue car je n'avais pas l'habitude des exercices que les autres faisaient tous les jours. C'était nouveau pour moi et j'essayais de suivre comme je pouvais. Malgré ça, j'avais une réelle envie de faire de la danse, et pour avoir surmonté les obstacles de l'obésité, ça me semblait évident que j'en voulais. Mais à la fin du cours, je suis allée voir la prof pour qu'elle me dise si c'était éventuellement possible que j'intègre l'école. Je ne me souviens plus de tout ce qu'elle m'a dit, à part une phrase, mot pour mot:
"vous avez vu votre corps? Y'a tout à refaire!" , avec le petit ton méprisant et de dégoût qui va avec. Genre: celle-là elle se permet d'être disforme, quel toupet!
Je venais de perdre 35kg, et elle me dit ça... Bon, j'ai bien compris qu'elle ne voulait pas de moi et qu'elle se fichait pas mal des efforts que j'étais prête à faire. A part cette phrase qui m'a choquée, cette audition ne m'a pas plus traumatisée que ça, j'ai compris qu'ils ne prenaient que des "corps" sur lesquels le travail serait facile. Ils ne s'embarrassent pas à relever des défis, à amener au sommet des personnes qui n'ont à priori aucunes prédispositions pour la danse.
Retournons donc à ma nouvelle école, qui elle, a bien voulu de moi, malgré mon corps. Mon professeur voulait que je maigrisse encore, mais ce n'était pas pour une question d'esthétique, mais plutôt pour que, selon lui, je trouve un meilleur tonus dans mes articulations. Je sais pas si j'explique bien... Quelqu'un de gros a l'air lent quand il bouge, parce que visuellement on dirait qu'il a peu d'amplitude de mouvements.
Bref quoiqu'il en soit, mon régime protéiné ne fonctionnait plus, ça faisait plusieurs mois que je ne maigrissais plus, et j'étais tellement affamée que je mangeais 6 golden au goûter. Que faire?
Je suis retournée voir mon médecin qui m'a prescrit du sibutral qui me faisait énormément transpirer pendant les cours de danse. Parallélement à ça, j'ai adopté le régime "anorexie". Et plus je me privais, plus j'avais l'impression de ne pas maigrir.
Il est clair que mon corps, après avoir perdu 35 kg, ne voulait plus perdre. Je me retrouvais face à un sérieux problème. Le sibutral n'avait pas l'air de vraiment agir, même si je crois qu'il m'a fait perdre quelque fois des semblants de kilos.
Le cercle infernal de l'anorexie-boulimie a démarré.
Pendant plusieurs mois, j'étais habitée par la peur de grossir, car il arrivait parfois que je mange peu et que je prenne du poids. Ca a quelque chose d'effrayant. J'étais terrorisée par l'idée de manger, mais aussitôt les cours terminés, j'allais au supermarché et me goinfrais de biscuits. Je les mangeais dans la voiture.
Je me souviens que j'avais mal physiquement dans tout mon corps, c'était le démon qui réclamait de la nourriture. Ce démon me faisait mal dans mes bras et mes jambes pendant des heures jusqu'à ce que je craque et aille manger. Parfois je réfléchissais pendant 2h avant un repas pour choisir ce que j'allais manger, j'essayais de faire des compromis avec le démon, mais ça ne lui plaisait pas. Ca me torturait vraiment.
Et quand le démon le décidait, j'étais forcée de manger et manger encore, de finir tout ce qui était dans mon champ de vision. Je pleurais parfois même en mangeant, et ensuite venait le terrible sentiment de culpabilité qui s'accompagne parfois de grosses douleurs à l'estomac. C'était un cercle infernal où à chaque instant je souffrais. A tour de rôle: les douleurs physiques, puis la culpabilité, et ça repartait de plus belle dès que mon estomac commençait à se vider.
Je me souviens de tous ces jours où j'arrivais à l'école le matin, je me regardais et me regardais encore dans le miroir, j'avais une tête d'enfer comme si j'avais passé la nuit sur le grand 8, et qui semblait même changer de forme pendant que j'étais en train de me regarder. Et puis je regardais mes bras, mes fesses, mes jambes comme si j'arrivais pas à croire que cette horreur était bel et bien moi. Je n'arrivais pas à décoller le regard de ce miroir.
Parfois je pleurais pendant les cours tellement la douleur était intense, ce démon me harcelait sans cesse et me faisait me sentir profondément mal. Parfois je laissais tomber le cours en plein milieu du 1er exercice tellement j'étais torturée. J'allais alors m'assoir sur le côté de la salle et le prof était quelque peu étonné de ce que j'avais l'air de vivre. J'en venais même à me dire que si je n'arrivais plus à contrôler mon corps, si ce démon l'habitait à ma place, à quoi servait-il encore de vivre?...
Quand notre corps ne nous appartient plus et que quelque chose a pris le pouvoir sur nous...
Au bout de plusieurs mois j'ai fini par aller voir un psychiatre, qui avait l'air de bien connaitre les troubles de l'alimentation chez les jeunes. Il m'a prescrit 4 prozac par jour. Oui 4! Personne ne me croit jamais mais c'était ça.
Dans le même temps je suis devenue équipière à quick pendant les week end. Je bougeais donc beaucoup.
Ca + le prozac m'a fait perdre 10 nouveaux kilos en 3 mois. J'étais à 58 kilos. Ces kilos je les ai perdus facilement, sans me rendre encore plus malade que je l'étais déjà.
Et de maigrir, ça me donnait envie de maigrir encore et encore. J'avais pas encore atteint mon but. Mais quand on a une telle perte de poids, on ne sait plus quand s'arrêter. On a envie de ressembler aux filles des magazines. Et puis surtout on se dit que ce qui "bien" c'est de maigrir, non pas d'être maigre ou mince, mais d'être en perte de poids, tous les jours.
Si l'on est maigre mais que l'on ne perd plus, on se sent mal, on culpabilise, on se trouve grosse. Le résultat de la balance fait, chaque jour, qu'on passera une bonne journée ou non. C'est décisif.
J'ai voulu encore maigrir, je suis arrivée à 57kg, qui a été mon record. Je voulais maigrir, et je faisais des cures de 2 semaines où je mangeais un sachet de potéines en poudre par jour. Environ 200 calories de protéines quasi-pures. A cela j'associais le thé vert (le fameux thé vert), d'autres produits à mettre dans la bouteille d'eau pour le drainage, des exercices de gym censés affiner certaines parties du corps, et tout un tas d'autres trucs, par exemple le coup de respirer l'air frais à la fenêtre au réveil pour mettre le corps en marche. J'étais devenue complètement obsédée, possédée même. Et cela ne m'a fait perdre que 200g.
200g!!! Les 200g je les reprends en mangeant une pomme! 200g c'est rien, c'est du foutage de gueule.
J'ai eu sérieusement peur parce que je me suis rendue compte que si je perdais 200g à peine en mangeant 200cal par jour, si j'en mange 600cal, je grossirais forcément. Et c'est ce qui arrivait d'ailleurs. C'est arrivé plein de fois que je mange peu et que je prenne du poids. C'était une histoire à rendre dingue.
De plus je souffrais horriblement de l'image de mon corps, il n'avait pas maigri comme je l'avais prévu. Je n'avais encore jamais été adulte et mince à la fois, par conséquent je n'avais jamais su auparavant comment pouvait être mon corps, quelles formes il pouvait avoir.
La forme de mes jambes ne me plaisait pas. Ca ne ressemblait pas du tout aux filles des magazines. J'avais encore de grosses cuisses, mais plus rien dans la poitrine, c'était vide, la peau était flétrie, comme sur les photos des femmes dans les camps de concentration. C'était une image choquante qui me déprimait. J'étais très déçue de découvrir un corps qui était très loin de mes attentes.
La fameuse prof de danse du début ne s'est pas empêchée de faire une remarque sur ma poitrine à ce moment là.
Mais que faire quand on est grosse des cuisses et qu'on a les seins vides? Arrêter ou poursuivre le régime?... Que faire dans cette situation bizarre?... D'autant plus que je voyais des filles minces qui avaient de la poitrine, alors je comprenais pas pourquoi moi j'avais ce genre de problème. D'ailleurs à part moi j'ai jamais vu une fille modérément grosse avec une poitrine minuscule. Je flottais complètement dans du bonnet A, ça faisait plein de plis. Ca me rendait dingue que le mauvais oeil s'acharne sur moi.
J'ai été obligée de cesser le prozac parce qu'il me faisait transpirer rouge. Et ces taches rouges sur les vêtements ne partaient pas au lavage. Maintenant y'a polémique encore, certains disent que c'était pas la faute du prozac. Mais pour mon psy, ça l'était, et il a changé mon traitement. Sauf que ce nouveau médicament me donnait des pulsions envers la nourriture, et je ne l'ai pas pris longtemps.
A propos des effets secondaires du prozac, si ça intéresse quelqu'un, pendant la période où je le prenais, j'étais devenue assez rebelle. Pas dans le mauvais sens du terme, mais par exemple, quand je voulais quelque chose, je le voulais vraiment, et si j'avais quelque chose à dire, je le disais.
Ca m'est arrivé de demander à un inconnu d'Internet, habitant à 300 km de chez moi, d'aller me chercher une bricole dans un Pimkie de chez lui qu'il n'y avait plus dans ma région. Et je lui ai envoyé le chèque et l'enveloppe pour qu'il m'expédie l'objet. J'ai même du me battre avec les vendeuses de Pimkie qui ne voulaient pas mettre de côté l'objet plus de 2 jours, bien que je leur ai assuré que quelqu'un viendrait l'acheter.
Et pendant les cours, je me mettais à poser tout un tas de question très pertinentes au prof, alors que jamais de ma vie, durant toute ma scolarité, je n'ai posé une seule question aux profs.
Après ça, je me suis enfermée dans une sorte d'anorexie un peu bizarre. Je me suis mise à manger exactement la même chose tous les jours, de peur de grossir si je changeais mes petites habitudes.
-un pain au chocolat le matin
-une assiette de pâtes à l'huile de noix à midi
-un sunday au caramel et un muffin choco au goûter
ET C'EST TOUT !
J'allais donc au mac do tous les jous en cette période. Et ce cirque a duré plusieurs mois. Je me rappelle que les jours ferriés ou le mac do était fermé, je me retrouvais face à une terrible angoisse: trouver une solution de secour, un plan B. Généralement ça finissait en crise.
Evidemment ça m'est arrivé quelques fois d'aller au resto avec mon petit copain, mais je peux vous dire que la crise me guettait, et que je partais au quart de tour si le cuisinier avait le malheur de mettre une goutte de sauce de trop dans ma salade. Ca m'obsédait, j'étais terrorisée à l'idée de regrossir. Y'a plein de soirées qui ont été dans le stress et le désespoir parce que le cuisinier avait pas fait exactement comme je voulais. C'était comme si j'apprenais une terrible nouvelle qui allait bouleverser ma vie. J'étais une cliente infernale.
Dès qu'il s'agissait de manger pas comme d'habitude, ça posait un énorme problème! Tout mon quartier en était informé presque.
Toujours dans le but de m'affiner, j'ai voulu faire des séances de palpé roulé. Je suis tombée sur une pseudo nutritionniste à deux balles qui m'a tout de suite fait culpabiliser par rapport à ce que je mangeais. Elle disait que c'était pas étonnant que je maigrisses pas en mangeant un pain au chocolat tous les jours. Oui vous avez bien entendu elle me reprochait de manger un pain au chocolat tous jours, à tous mes petits déjeuners. Elle me disait que c'était 400cal le pain au chocolat, mais je lui ai répondu que le mien faisait 258, c'était marqué au dos du paquet.
Bref elle a usé de tous les moyens pour me rendre dingue. Elle a voulu m'interdir les choses que je mangeais et auxquelles je me raccrochais pour ne pas grossir, et comme j'avais la sensation de manger déjà très peu, je l'ai très mal pris. Je suis ressortie de là en crise et je ne suis plus jamais retournée la voir.
Je reconnais que je ne mangeais pas équilibré, c'était quasi que des sucres, cela dit je faisais de la danse à haut niveau, environ 20h/semaine, et ça me permettait de manger mes cochonneries sans grossir. Y'a même certains jours ou je mangeais la moitié de mes pâtes avant le cours, et l'autre moitié après le cours. Parce que dans cette école y'avait des cours entre 12h et 14h. Ca rendait l'élimination encore plus optimale me semble-t-il.
J'avais trouvé un équilibre qui me convenait pas trop mal et qui m'enlevait en partie cette peur de grossir.
A la danse, y'avait une fille que j'aimais pas et qui me faisait tout le temps des remarques sur ce que je mangeais. Elle disait "tu manges encore des pates?" comme si elle me voyait comme une obèse qui adore se goinfrer de pâtes. Je le prenais mal forcément. J'avais pas envie qu'on croit que je mangeais par gourmandise.
Mon professeur de danse, lui, m'a félicitée d'avoir réussi à maigrir! Il était génial et c'est quelqu'un que j'aimais beaucoup.
Peu de temps après ça, il a appris de mes amies mon petit menu quotidien avec les pains au choc, les pâtes et les sunday. Il a pas trouvé ça drôle contrairement à mes amies, et m'a dit qu'il vaudrait mieux que je mange plutôt des légumes, que ça me permettrait d'avoir une meilleure énergie dans mes mouvements. J'ai été assez attristée que mon menu ne lui plaise pas, et qu'il veuille que je me remette aux légumes.
J'ai fini par trouver un centre de palpé roulé où le gars, avec son attestation de présence à la formation du palpé-roulé (genre grand diplôme!), ne me mettait pas trop de pression, mais dans les premiers jours seulement. Car, même si sa petite machine lui disait que mon taux de graisse dans le corps était inférieur à la norme pour des jeunes filles de mon âge, il me reprochait de manger au mac do. Ca me blessait beaucoup et je trouvais qu'il avait pas de jugements à porter sur ma façon de m'alimenter.
Le jour de la dernière séance, pour pas qu'il me reproche encore d'aller au mac do, j'avais pas bu de la journée pour lui faire croire que j'avais perdu du poids. Mais ça machine lui a dit que j'étais déshydratée, même si la balance était de mon côté. Je pensais pas qu'elle fonctionnait vraiment sa machine!
Il a repris les mensurations de toutes les parties de mon corps. Y'avait une sacrée différence par rapport au premier jour où j'étais arrivée. Cependant j'ai des doutes sur la façon dont les mesures ont été prises le premier jour, car moi dans la glace je ne voyais aucun changement. Les mètres étaient peut-être truqués, j'en sais rien.
Au passage, j'ai été sur le site internet de ce centre de palpé roulé, et quelle ne fut pas ma surprise de voir que le site s'adressait exclusivement à des personnes qui voulaient s'engager dans le palpé-roulé, du côté professionnel!
Bref, au fil du temps, et pour diverses raisons, j'ai arrêté la danse, l'image de mon corps me montait trop à la tête. J'avais choisi la danse pour une raison un peu spéciale: être belle et aimée (comme tous les danseurs). Mais c'était un enfer, je ne m'en sortais pas, même si au fond j'étais réellement belle et aimée. Je regrette beaucoup maintenant d'avoir arrêté. C'était ma raison de vivre et mon unique but dans la vie. Maintenant je n'ai plus rien. Ni belle, ni aimée.
Après avoir arrêté la danse, j'ai regrossi un peu, j'ai fait de nouveaux régimes, tantôt des régimes protéinés avec les sachets, tantôt des régimes "anorexie" où un cookie me fait 3 repas. J'arrivais à peu près à me maintenir à un poids "acceptable". Et puis j'ai perdu mon boulot. Je suis au chômage depuis un an et j'ai repris tous mes 40 kilos. Je n'ai pas réussi à faire autrement, je me suis vue grossir jour après jour sans trouver la force de réagir.
Tout ce que j'ai souffert dans le passé avec l'alimentation n'a servi à rien, je me retrouve au point de départ, grosse, obèse, insultée par les gens.
J'ai vécu un tel calvaire avec la nourriture, j'ai tellement jamais réussi à être mince sans être malade mentalement que j'ai très peur de la privation. J'ai peur de me priver et que ça tourne mal. Et je me sens totalement incapable de m'infliger à nouveau la privation.
Je sais que si je me prive, ça va faire monter la pression, et que je serai obligée à un moment ou à un autre de me goinfrer pour décompresser. Ca ne marchera pas. Et même si j'y arrivais, ça m'a l'air malsain de se priver jour après jour. Donc voilà, je suis à nouveau grosse, et malheureuse, sans la danse, sans petit copain et sans plus rien.
Je me demande comment font les autres pour être minces, car la majorité ne semble pas souffrir mentalement à cause de la nourriture. Elles ont pas l'air d'en baver autant que ce que j'en ai bavé. Je sais pas comment on fait pour être mince sans être traumatisée par la nourriture.
Merci d'avoir lu mon histoire, je suis très bavarde. J'attends impatiemment vos réflexions ou commentaires pour ceux qui ont eu le courage de tout lire. J'espère que ça n'a pas été trop pénible.
Tu peux rire de moi maintenant. Mais je suis fière de moi et je reste de marbe face à vos insultes. Qui tue par le glaive, meurs pas le glaive!